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Fête de l'Ascension, homélie du P. Abbé Vladimir

Chers Frères et Sœurs,
En ce jour nous faisons mémoire de l’Ascension, c’est à dire de l’exaltation de Jésus. La vie humaine du Ressuscité est désormais dans un autre registre, celui de la gloire et du royaume. L’élévation spatiale que les Actes des apôtres décrivent n’est qu’une représentation symbolique de cette exaltation de l’humanité du Christ réalisée dans toute sa plénitude après être passée par la mort, et la mort de la Croix. Et pourtant, que ce soit dans l’Évangile que nous venons d’entendre, où dans les Actes des Apôtres, cette élévation au dessus de tout n’est pas présentée comme la conclusion de la vie de Jésus mais comme un nouveau début. Celui qui fait toutes choses nouvelles nous invite dans un commencement qui concerne chacun d’entre nous, un commencement qui n’aura pas de fin. C’est ce que, de manière paradoxale, la prière d’ouverture de ce jour nous dit. L’Ascension qui pourrait sembler une prise de distance nous rapproche du Christ dans la gloire, comme un corps uni à sa tête et nous propose de vivre avec lui. Nous qui participons à cette célébration, nous sommes invités à vivre comme un corps nouveau en ayant déjà en nous et entre nous, les sentiments qui sont dans le Christ Jésus, à vivre déjà des mœurs du Royaume. À cette invitation, nous pouvons répondre librement mais si nous répondons, tout devient nouveau et bien des choses nous deviendront d’une certaine manière étrangères. Ce n’est pas pour rien que le mot paroisse qui nous semble familier dérive d’un mot qui dans l’antiquité désignait la résidence dans un pays étranger. C’est celui que la Bible au livre de la Genèse utilise pour parler d’Abraham qui résida en Egypte comme un étranger. Et nous savons combien toute l’Écriture insiste pour nous rappeler que tous nous avons été étrangers et que c’est l’un des visages que le Christ prend pour venir à notre rencontre.
Proclamez l’Évangile à toute la création dit le Sauveur dans l’Évangile de Marc. Dans les Actes, il invite ses apôtres à être ses témoins jusqu’aux extrémités de la terre, non a rétablir la royauté en Israël. Cette bonne nouvelle car c’est ce que signifie le mot Évangile concerne donc tous les hommes jusque dans leur manière d’opérer dans le monde qu’ils doivent cultiver, dont ils doivent prendre soin et non l’exploiter. Et cela est encore plus vrai dans leurs relations avec les autres hommes. Si l’Évangile est destiné à tous, jusqu’aux extrémités de la terre, c’est qu’il peut se traduire dans toutes les langues ce que nous fêterons à la Pentecôte. Il est à la fois universel et prenant une tonalité singulière dans chacune de nos cultures, variété dont se construit le corps du Christ. Aujourd’hui le christianisme vit un moment historique qui peut sous certains aspects nous dérouter mais que nous, moines cisterciens, qui vivons dans un ordre international percevons très bien. D’une religion massivement à domination européenne, il est en train de devenir une religion avec de multiples centres, de multiples échanges. Quelque chose de nouveau est en train de se construire comme lorsque l’Évangile est passé aux grecs puis aux barbares dont nous sommes d’une certaine manière les héritiers. Il n’y a qu’à regarder le nombre de prêtres d’origine non européenne qui servent dans nos paroisses, ces maisons d’étrangers, pour nous en convaincre. Dans un regard de foi, nous pouvons discerner que c’est ainsi que le corps du Christ grandit vers toute sa plénitude. C’est ainsi aussi que toute l’humanité s’enrichit car les replis sur soi et la défense d’un monde autocentré ne conduisent qu’à la violence et à la guerre.
Alors que nous vivons dans ce que le Pape François appelle une troisième guerre mondiale par morceaux, écoutons ce que l’Esprit dit aux Églises : « ayez beaucoup d’humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour ; ayez soin de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix ». L’humilité qui n’a rien à voir avec la servilité mais qui est le refus de vouloir l’emporter sur les autres à tout prix, la douceur qui est le signe d’une vraie force, la patience qui seule nous permet d’aimer en vérité .
Ayons beaucoup d’humilité, de douceur et de patience et construisons ainsi la paix que le Christ nous a laissé.