Chers Frères et Sœurs
« Restez en tenue de service ». C’est ce que dit le début du passage de l’Évangile de Luc que nous entendons pour la fête de saint Honorat. Tout le Nouveau Testament comme par exemple le passage de la lettre aux hébreux que nous avons entendu insiste sur l’importance du service, de l’accueil, de l’hospitalité. De ce service inconditionnel, la parabole du Bon Samaritain dans l’Évangile de Luc en est une des évocations les plus parlantes. Mais ce que dit le Seigneur dans l’Évangile de ce jour en parlant de service semble se situer à un autre niveau. Le serviteur et le service dont parle l’Évangile de ce jour est d’abord le service du maître parti pour les noces et donc l’attente de son retour. Et cette attente qui caractérise ce service, cette attente d’un inattendu est le lieu d’une révélation, d’un renversement. C’est finalement le maître qui se mettra en tenue de service, la ceinture aux reins et passera pour les servir.
Serviteur et service, ces mots reviennent à plusieurs reprises dans la vie d’Honorat qui institua la vie monastique sur cette île au début du cinquième siècle. Sa conversion à la vie monastique est décrite comme un service : « Très vite, il s’est élancé vers la vie religieuse avec toute la flamme que l’étincelle qu’il avait ainsi alimentée avait fait naître. Tandis qu’il ployait la nuque sous le joug en se mettant au service du Seigneur ».Il s’engage dans ce service parce qu’il considère le Christ comme le trésor le plus précieux. Toute la vie d’Honorat témoigne de ce lien étroit avec le Christ qu’il entretiendra pendant toute sa vie dont il allait jusqu’à répéter le nom jusque dans son sommeil. Servir, c’est attendre le Christ tout en goutant et en étant attentif à sa présence. Mais se convertir à la vie monastique avec son frère Venance implique aussi qu’il abandonne ses biens pour les mettre au service des pauvres. Il n’y a pas pour lui de service du Christ sans service des pauvres. La vie d’Honorat nous parle aussi de la vie monastique comme un service angélique que l’on peut comprendre d’après ce que dit l’éloge du désert d’Eucher comme la célébration de la liturgie. Elle nous le montre aussi tissant des liens avec de multiples personnes qui lui deviennent chers par les services qu’il leur rend. Tous ces services sont ensemble pour lui un unique service du Christ. Notre Saint est décrit dans toute sa vie aussi bien comme moine que comme évêque comme le serviteur fidèle parce qu’il est avant tout le serviteur du Christ mais aussi parce qu’il s’est fait le serviteur de tous aussi bien dans sa communauté qu’à l’extérieur d’elle.
Dear Brothers and Sisters,
Il nous est difficile de nous représenter en détail comment les premiers moines ont vécu sur cette île même s’il est important pour nous de nous sentir leurs héritiers et leurs continuateurs. Mais à travers les siècles, nous sommes reliés à eux par cette idée de service. Les mots service, serviteur et service sont aussi très présents avec des niveaux de sens voisins dans la Règle de Notre Père saint Benoît qui guide notre vie aujourd’hui.
La vie d’Honorat par Hilaire d’Arles se termine par une prière qui lui est adressée : « Obtiens que, dans une aspiration commune, nous méritions de respecter tes ordres et tes enseignements ». Demandons au Seigneur par son intercession la grâce de devenir toujours de meilleurs serviteurs, cherchant à converser avec Dieu dans la solitude comme Moïse, faisant demeurer dans notre communauté l’amour fraternel et l’hospitalité inconditionnelle, vivant avec le Christ qui nous a donné sa vie sur la croix ce grand retournement où les rôles s’inversent à son exemple.
P. Abbot Vladimir